Analyse des plans de sauvegarde REA et RSG – Contiennent-ils des biais susceptibles d’induire en erreur les investisseurs-bailleurs ?

Après la publication du plan de sauvegarde de Réside Etudes Seniors et la reprise d’une grande partie des résidences par les sociétés Zenitude et Stella, c’est au tour de REA (RESIDE ETUDES APPARTHOTEL) et RSG (RESIDENCES SERVICES GESTION) de voir leurs plans de sauvegarde publiés le Jeudi 5 décembre dernier. Le vote en ligne par les copropriétaires qui ont été joint individuellement par courrier à ce sujet sera ouvert entre le 9 décembre 2024 à 12h00 (heure de Paris) et le 20 décembre 2024 à 12h00 (heure de Paris).

Voici la liste des documents mis à disposition par les administrateurs judiciaires soit plus de 500 pages par plan de sauvegarde :

Les documents mis à disposition :


On peut cependant se demander si la profusion d’informations et d’hypothèses ne servent pas à noyer le poisson et si les petits investisseurs ne vont pas servir de variable d’ajustement afin de préserver les paiements des créances privilégiées. Voici les points clés issus des documents fournis et les observations associées :

Analyse des Hypothèses Financières et des Prévisions.

Les prévisions financières reposent sur des hypothèses fournies par le management du groupe ne reflètent pas la réalité actuelle. Ces hypothèses semblent trop optimistes, notamment en ce qui concerne les projections de trésorerie et les résultats d’exploitation future. « Les prévisions de trésorerie ont par nature un caractère aléatoire. Par conséquent, nous ne pourrions en aucun cas être tenus pour responsables de la non-réalisation des prévisions présentées dans ce projet de rapport. » « Les prévisionnels de trésorerie n’intègrent pas d’ajustements pour se recaler à la position de trésorerie réelle à fin septembre 2024. 【Annexe3】【Annexe4】.

Les prévisions de trésorerie ne tiennent pas toujours compte de certains ajustements importants, comme les flux de trésorerie réels de septembre 2024, ce qui peut biaiser la perception de la solidité financière à court terme. En effet, ces omissions soulignent une analyse incomplète, limitant la fiabilité des prévisions et augmentant le risque d’erreur dans les projections financières. « Aucune analyse sur le périmètre hors Sauvegarde n’a été réalisée (celui-ci étant hors de notre scope d’intervention). Les flux venant de ce périmètre n’ont donc pas été pris en compte. » « Aucune analyse du current trading n’a été effectuée depuis le mois de juin. » 【Annexe4】.

Objectifs Stratégiques et Réalisme.

Le plan prévoit des restructurations majeures, des cessions d’actifs et une réduction significative des coûts. Cependant, ces stratégies manquent de détails opérationnels clairs, ce qui rend leur mise en oeuvre incertaine. « La mise en oeuvre réussie du plan est conditionnée à une évolution de l’organisation fonctionnelle et structurelle de l’entreprise que celle actuelle. Il manque donc des précisions importantes à ce sujet. » « Il est prévu l’arrêt de l’exploitation de résidences à Dijon, Saint Etienne et Rennes en 2025 mais le CSE note qu’aucune action n’a pu encore été menée. » 【Observations CSE】【AVIS_MJ_CPA】.

La répartition des CAPEX (investissements) semble déséquilibrée et pourrait refléter un manque de cohérence stratégique dans l’allocation des ressources. En effet il est cité ci-après une allocation disproportionnée des investissements (CAPEX) entre les deux entités REA (Résidences Appart’Hôtels) qui reçoit 6 millions d’euros pour 55 résidences tandis que RSG (Résidences Services Gestion) reçoit 5 millions d’euros pour 110 résidences. Cette répartition soulève des questions sur les critères utilisés pour définir les priorités d’investissement et pourrait indiquer un manque de cohérence stratégique dans l’utilisation des ressources. Elle peut également refléter une vision biaisée ou un déséquilibre dans la prise de décision entre les différentes branches. Ceci est d’autant plus difficile à admettre que RSG (résidences pour étudiants) semble non impacté par la crise. « Le CSE est satisfait des prévisions de CAPEX (11 millions par an indexés sur l’inflation seront distribués pendant 10 ans) mais a besoin que ces CAPEX soient mis au regard de la maturité des résidences. » « Des précisions sont également nécessaires pour mesurer la répartition de ces CAPEX. Le CSE s’étonne par exemple de la répartition entre RSG et REA (5 millions d’euros sur 110 résidences RSG et 6 millions d’euros sur 55 résidences REA). » 【Observations CSE】.

Implications pour les Créanciers et Bailleurs.

Les modalités de remboursement présentées aux créanciers montrent des délais prolongés (jusqu’à 10 ans) et des paiements annuels. Bien que cela puisse être justifiable pour alléger la trésorerie du groupe, cela expose les créanciers à un risque accru en cas de non-réalisation des objectifs financiers. Les échéances peuvent s’étaler sur plusieurs années (maximum 10 ans), avec des paiements annuels. » « Si les projets de plans ne sont pas approuvés par les créanciers et adoptés par le tribunal, les sociétés pourraient être placées en redressement ou en liquidation judiciaire. Dans ce cas, les créanciers risquent de ne recevoir aucune somme ou d’être soumis à un calendrier de remboursement encore plus incertain. » 【RESIDE_FAQ】.
Nota. Ceci est erroné pour les bailleurs qui en cas de liquidation retrouvent alors leur bien valorisé au prix du marché celui-ci pouvant être calculé sur la base locative avec REA.

Les plans comportent un risque significatif si les cessions d’actifs prévues ne se réalisent pas dans les délais ou si les montants attendus sont inférieurs aux estimations. Cela pourrait affecter la viabilité des remboursements des créanciers. De plus les montants estimés (16,8 M€ et 24,8 M€) et les délais prévus (2025-2027) représentent des hypothèses clés, mais elles restent sujettes à des incertitudes liées aux conditions du marché immobilier et aux contraintes de calendrier. Alors si les cessions ne se réalisent pas ou si les montants obtenus sont inférieurs aux attentes, les créanciers pourraient ne pas être remboursés comme prévu, compromettant ainsi la viabilité du plan de sauvegarde. Cela constitue un risque majeur à considérer pour refuser ou demander des révisions du plan. « Les plans offrent une perspective raisonnable d’éviter la cessation des paiements ou de garantir la viabilité de l’entreprise, sous réserve de la réalisation de toutes les conditions mentionnées dont notamment (i) celles touchant au programme de réduction des coûts, (ii) à la restructuration opérationnelle du groupe et (iii) surtout aux programmes de cessions des actifs immobiliers synthétisés ci-dessous, indispensables à la bonne exécution des plans du groupe. :
– 16,8 M€ à percevoir entre 2025 et 2027, y compris la cession des entités internationales du Groupe ;
– 24,8 M€ à percevoir entre 2026 et 2027 avec la cession des actifs SARL Pasteur, SAS Réside Étude Patrimoine, SARL François Arago, SCI Gallieni Patrimoine, SCI RT Marseille le Castel, Aix Jas de Bouffan, Le Récif (La Réunion) et Foncière Commerce Chessy. »【AVIS_MJ_CPA】.

Transparence et Gouvernance.

Le manque de clarté dans la gouvernance et les rôles des nouveaux dirigeants, comme le Directeur Général Opérationnel, soulève des préoccupations et un risque d’incohérence quant à la transparence et à la capacité d’exécution des plans. De même la répartition inégale des investissements (CAPEX) entre les différentes branches semble injustifiée et soulève des questions sur la stratégie globale « Une organisation cible de la gouvernance a été transmise. Le CSE va demander des précisions sur le fonctionnement de cette nouvelle gouvernance. » « Des précisions sont également nécessaires sur les fonctions et attributions du futur directeur général opérationnel ainsi que du secrétaire général. » 【Observations CSE】.

Certaines informations clés sur les leviers économiques identifiés (comme la renégociation des loyers) restent non documentées ou peu détaillées. Le manque de documentation sur des leviers économiques (dont la renégociation des loyers qui va à notre encontre en tant que propriétaires-bailleurs) et l’absence de détails opérationnels sur la mise en oeuvre de ces économies, ce qui soulève de grands doutes sur la faisabilité des projections économiques du plan. Ce manque de transparence et de précision sur des aspects clés comme les loyers ou les outils IT rend difficile l’évaluation des chances de succès du plan et constitue une faiblesse importante. Les créanciers et investisseurs doivent exiger des explications et des preuves solides avant de soutenir un tel plan. « Le CSE va mener des investigations sur l’ensemble des leviers identifiés pour réaliser des économies, notamment les achats et la renégociation des loyers propriétaires. » « Il est notifié dans les axes d’économie l’optimisation des coûts IT : alors que des outils manquent dans certains métiers et d’autres sont présents mais manquent d’efficacité, il est primordial de clarifier ce point déterminant pour permettre une optimisation des charges mais surtout une meilleure productivité des salariés et une meilleure compétitivité. » 【Observations CSE】.

Conflits d’Intérêt et Traitement Équitable.

Bien que les mandataires judiciaires affirment que les parties affectées sont traitées équitablement et proportionnellement à leurs créances, cette affirmation est conditionnée par la réussite des ventes d’actifs et de la restructuration opérationnelle. Cela laisse un risque potentiel pour les créanciers minoritaires. En effet les cessions d’actifs deviennent une condition critique, mais leur succès n’est pas garanti, mettant en danger l’équité des parties. « Les plans offrent une perspective raisonnable d’éviter la cessation des paiements ou de garantir la viabilité de l’entreprise, sous réserve de la réalisation de toutes les conditions mentionnées dont notamment (i) celles touchant au programme de réduction des coûts, (ii) à la restructuration opérationnelle du groupe et (iii) surtout aux programmes de cessions des actifs immobiliers synthétisés ci-dessous. » 【AVIS_MJ_CPA】.

Document : Avis des Mandataires Judiciaires. Bien que l’égalité soit affirmée, les conditions des classes de créanciers dépendent fortement de la réussite des cessions d’actifs, créant un risque inégal en cas d’échec. « Les parties affectées, partageant une communauté d’intérêt suffisante au
sein de la même classe, bénéficient d’une égalité de traitement et sont traitées de manière proportionnelle à leur créance ou à leur droit. » « Lorsque des parties affectées ont voté contre le projet de plan, aucune de ces parties affectées ne se trouve dans une situation moins favorable, du fait du plan, que celle qu’elle connaîtrait en cas de liquidation judiciaire. »

En résumé, les faiblesses de ces plans de sauvegarde :

  • Une manque de Réalisme des Hypothèses : Les hypothèses financières, notamment les prévisions de trésorerie et les résultats d’exploitation, doivent être révisées pour refléter des scénarios plus conservateurs.
  • Une insuffisance de garanties : Des garanties sur la réalisation des cessions d’actifs, y compris des estimations indépendantes de leur valeur réelle doivent pouvoir être obtenues auprès des administrateurs judiciaires.
  • Une transparence Incomplète : Des précisions sur les modalités de gouvernance et la répartition des CAPEX doivent pouvoir être fournis.
  • Des risques pour les créanciers : Soulignons le risque élevé pour les créanciers en cas d’échec des cessions d’actifs ou d’atteinte des objectifs financiers.

Après analyse de ces documents il apparaît donc qu’un grand nombre d’hypothèses ont été prises pour la rédaction de ces documents, beaucoup d’entre-elles sont floues, vagues et souvent optimistes ce qui offre un biais positif à l’ensemble du plan. Une approche à base de scénario qui associeraient des hypothèses et des budgets chiffrés aurait apporté plus de rigueur et de crédit à ce plan. Il appartiendra aux copropriétaires d’évaluer les risques et de faire confiance ou non aux analyses fournies comme base de leur avis pour voter en faveur ou rejeter le plan de sauvegarde pour chacune des deux entités REA et RSG.

Analyse faite avec l’assistance d’une IA. Contenu final, révisions, ajouts et éditions par les auteurs.

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MONTANARI

Oups.. cela laisse perplexe. Quelqu’un peut il m’éclairer sur des questions simples (ou simplistes, je m’en excuse) par rapport au vote sur ce plan de sauvegarde. Si la majorité vote « pour », le vote s’impose-t-il à tous ? En revanche, si le vote est « non », compte tenu de l’éclairage apporté dans cette analyse, risque-t-on d’être encore moins bien traité ? je suppose que répondre à cette question n’est pas simple et relève de la boule de cristal. Mais on a le sentiment diffus d’être orienté vers un « oui ».. cela met un peu mal à l’aise.. Merci de vos commentaires.

yves COURTY

Comme beaucoup, je suppose, j’attendais une synthèse de ce genre. Celle-ci m’inciterait à voter « NON ». Mais quand je constate tous les points qui devraient être révisés ou précisés (« Les créanciers et investisseurs doivent exiger des explications et des preuves solides avant de soutenir un tel plan. »), je me demande si nous en avons le temps, sachant qu’il faut répondre avant le 20 décembre. merci, en tout cas, pour vos éclaircissements, les documents reçus étant plutôt illisibles pour un non-initié à ces questions .  

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